Ceintures et chaines de pénitence
D'après saint Basile et la règle de saint Benoit une ceinture ou une corde était nécessaire aux religieux pour retenir leurs vêtements. De là un rapprochement est fait avec l'expression biblique lumbi praecincti (les reins ceints ; cf : 4 Reg. 4, 29 ; Ps. 17, 40 ; Jer. 1, 17 ; Luc, 12, 35-40) dont le sens spirituel est associé aux idées de justice, fidélité et de force. De là on en a fait un symbole de continence et de virilité. Cette idée se retrouve dans la prière récitée par le prêtre qui se ceint du cordon avant de célébrer la messe : praecinge me, Domine, cingulo puritatis et extingue in lumbiis meis humorem libidinis ut maneat in me virtus continentiae et castitatis.
Ainsi certains ascètes ont vu dans l'emploi de la ceinture de fer, un instrument de pénitence, un moyen de sauvegarder la chasteté. Cette pratique de pénitence fut très en honneur parmi les ermites et reclus de Syrie : lourdes ceintures autour des reins, colliers de fer, bracelets de fer... Un ascète portait une ceinture de fer reliée à un chaine de fer par une troisième pièce métallique. En Occident on retrouve ce genre de pénitence parmi les nombreux reclus du XIIe et XIIIe siècles.
Evolution de la chaîne comme instrument de pénitence
Avec le temps ces chaînes deviennent plus discrètes afin qu'elles n'empêchent pas de vaquer aux diverses occupations et qu'elles soient plus faciles à dissimuler. Moyennant quelques pointes ou quelques noeuds elles peuvent encore infliger des sensations mortifiantes aux épidermes modernes. Ainsi saint Vincent de Paul, saint Jean-Marie Vianney, saint Louis-Marie Grignion de Montfort ont porté des chaînes de pénitences.
Sans critiquer de telles pratiques, nous pouvons dire que c'est plus admirable qu'imitable. Pour autant il existe un usage des chainettes comme objet de dévotion à la portée de tous qui, loin d'être un instrument de pénitence ou de torture, a avant tout une signification symbolique.
Condamnation par Rome du port des chaînes
Afin de rassurer les âmes un peu scrupuleuses et effrayées à la pensée de s'adonner à de telles pénitences, rappelons que le Saint-Siège a condamné à plusieurs reprises le port de chaînettes :
- Clément X, par deux décrets de l'Index du 5 juillet 1673 et du 2 octobre 1673, en défend l'usage à cause des abus, et proscrit certains livres en langue italienne qui en conseillaient le port ;
- par un bref 15 décembre 1675 il confirme les deux précédents et va même jusqu'à supprimer certaines confréries.
- Benoît XIV, par un décret de l'index de 1758, confirme encore la condamnation de Clément X.
Comment comprendre cette condamnation ?
Avec ces interventions romaines le sort de cette pratique de pénitence semble réglé : le pape n'en veut pas. Une telle affirmation est une conclusion un peu hâtive pour les raisons suivantes :
- ces décrets visent les abus,
- ils défendent le port de chaînettes, les livres, etc... qui étaient la cause de ces abus, et cela seulement en certaines confréries bien déterminées,
- en ces confréries, les chaînettes étaient le signe extérieur d'une dépendance mal comprise, comme un renoncement à toute liberté intérieure. Les décrets ne visaient donc pas la substance de la dévotion bien comprise ni une pratique extérieure bien réglée.
- Grégoire XV (1621 - 1623), Innocent X et Alexandre VII (1655 - 1667) ont doté d'indulgences d'autres confréries du saint esclavage et approuvaient même des règle où le port des chaînettes était rendu obligatoire (cf bref du 18 décembre 1631 d'Urbain VIII).
Les chainettes, symbole de notre soumission à Dieu
L'emploi des chaînettes ne disparait pas complètement, et même il est remis en honneur par saint Louis Marie Grignion de Montfort. Il en parle dans deux de ses oeuvres :
- dans le traité de la vraie dévotion à la sainte Vierge, il considère le port de petites chaînes de fer comme la troisième pratique extérieure de la dévotion qu'il enseigne
- dans l'ouvrage beaucoup plus court, "Le secret de Marie" il y a aussi plusieurs paragraphes sur le port de ces petites chaînes.
Des chaînettes pour l'esclave de Jésus et de Marie
La chaîne rappelle l'esclavage ou le bagne. Par le péché nous sommes devenus esclaves de Satan qui est un maître très cruel. De cet esclavage tyrannique nous avons été délivrés par la mort rédemptrice du Christ Sauveur. Ainsi nous passons de la servitude du Démon au service de Jésus. Compte tenu de ce que le Christ a fait pour nous, de l'amour infini qu'il nous porte, et combien nous l'avons offensé, nous désirons plus qu'être simplement au service de Dieu, nous vous lui appartenir totalement en se livrant et en se consacrant à Jésus et à Marie en qualité d'esclave. C'est un esclavage qui est doux comme le joug du Christ et il conduit à la vraie vie, à la vraie liberté.
Le port de petites chaines au cou, ou au bras, ou au pied, ou au travers du corps symbolisera et rappellera cette consécration à Jésus et à Marie comme leur esclave.
Des chaînes d'amour
Saint Louis Marie Grignion de Montfort, en plus de ce premier et principal symbolisme, attribue au port de chaînes d'autres significations ou finalités :
- comme protection contre les chaines du diable que sont nos péchés,
- honorer les cordes avec lesquelles le Christ Sauveur a été lié durant sa Passion pour nous rendre vraiment libres,
- les chaînes symbolisent l'amour par lequel le Christ nous attire à lui et les porter nous rappelle que nous devons toujours agir par amour : "je les attirerai à Moi par des liens de charité" (Osée, 4, 11).
Avant le Christ, la croix était objet d'ignominie, avec sa mort d'amour sur le calvaire, la croix portée par amour pour le Christ est devenue glorieuse ; ainsi les chaînes de l'esclave ou du forçat était signe d'opprobres, mais le Christ en nous libérant de la servitude du péché et en acceptant d'être garrotté, a rendu le port des chaînes par amour pour Lui digne de gloire et d'honneur.
Pratique de cette dévotion
Saint Louis Marie Grignion de Montfort conseille fortement le port des chainettes, mais il affirme aussi que cette pratique peut s'omettre sans remettre en cause le fond de cette dévotion à la sainte Vierge et cette consécration comme esclave décrite par le saint.
Si vous désirez pratiquer cette dévotion du port de la chaîne, cela peut se faire simplement. Au cas où vous portez déjà une médaille autour du cou à l'aide d'une chaîne, il suffit de la faire bénir et de la porter selon l'esprit de cette dévotion tout en gardant la médaille religieuse.
Vous pouvez aussi vous procurer sur notre boutique religieuse une chaîne que vous portez autour du cou et du poignet. Il est important de faire bénir cette chaîne. Dans la pratique d'une dévotion peu courante, il est bon de garder une certaine discrétion.