Développement de l'Eglise après les persécutions
Avec la paix constantinienne, en 313, une nouvelle période commence pour l'Eglise, jouissant de la liberté, de la considération. L'empire devient chrétien, l'art chrétien peut s'épanouir dans les églises. Aux martyrs succèdent les Pères théologiens, les moines ascètes. Maintenant il ne s'agit plus de transmettre la foi à des groupes restreints mais aux masses du peuple croyant.
Saint luc, réalisant une icône de la sainte Vierge, est guidé par un ange
L'art sacré, son rôle évangélisateur
A cette époque, les saints évêques sont conscients du rôle pédagogique que joue l'art sacré. Un grand nombre d'auteurs chrétiens se réfèrent dans leur argumentation aux images comme à une réalité très importante et dont le rôle est considérable.
L'icône sacrée supérieure à l'art oratoire
Ainsi saint Basile le Grand attribue à la peinture une force de conviction plus grande qu'à ses propres paroles ; ce Père de l'Eglise, après avoir prononcé tout un panégyrique à la mémoire du saint martyr Barlaam, termine en disant qu'il cède la place à une éloquence plus élevée : "Levez-vous à présent devant moi, vous les peintres des mérites des saints. Complétez par votre art cette image incomplète du chef d'armée. Eclairez par les fleurs de votre sagesse l'image indistincte que j'ai tracée du martyr couronné. Que je sois vaincu par votre peinture des actions héroïques des martyrs, je serai content de reconnaître, cette fois encore, une telle victoire sur moi…. Je regarderai ce lutteur représenté d'une façon plus vivante dans votre tableau. Que les démons pleurent vaincus encore une fois par le courage du martyr. Que leur soit montrée encore une fois la main brûlée et victorieuse. Que soit aussi représenté dans ce tableau l'Initiateur des combats, le Christ."
La peinture est une parole
Saint Grégoire de Nysse dans son homélie pour la fête de saint Théodore explique que "le peintre … ayant représenté dans l'icône les hauts faits du martyr… et l'image de l'Initiateur des combats, le Christ, ayant représenté tout cela par des couleurs avec art, nous a raconté clairement, comme un livre parle, les luttes du martyr…. car la peinture muette parle sur les murs et fait beaucoup de bien".
les images, une catéchèse pour les commençants
En occident saint Paulin de Nole (353 - 431), pasteur de grande expérience, voyait que les images attiraient bien plus que les livres l'attention des chrétiens et tout particulièrement des néophytes et des catéchumènes. C'est pourquoi il travaillait à avoir beaucoup d'images sacrées dans ses églises.
L'importance du sens de la vue
Ainsi l'Eglise s'efforçait de diriger tous les sens humains, y compris la vue, vers la connaissance et la glorification de Dieu. On pourrait même dire surtout la vue, car parmi nos sens humains est celui qui a le plus vive acuité de perception des choses sensibles. L'idée de la priorité de la vue dans ce domaine se manifeste de manière bien apparente à travers les écrits patristiques. Un auteur grec du IV - Vème siècle écrivait : "Dis-moi homme, si quelqu'un des païens vient à toi en te disant :"Montre-moi ta foi, afin que je croie aussi", que lui montreras-tu ? Ne l'élèveras-tu pas du sensible à l'invisible ?… amène-le dans une église…Place-le devant les saintes icônes."
L'icône sacrée orientée vers la prédication
Ainsi l'Eglise attribue à l'image une grande importance. Mais ce n'est pas sa valeur artistique ou esthétique qu'elle apprécie : c'est sa valeur de prédication. L'image est une véritable confession de la foi chrétienne. Ce caractère dogmatique est un trait essentiel de l'art sacré de l'Eglise orientale à toutes les époques. En Occident, pensons aux vitraux de nos cathédrales.
L'icône sacrée rempart contre l'hérésie
L'Eglise non seulement prêche par l'image, mais aussi combat l'hérésie.
Affirmation de la divinité du Christ
Nous voyons apparaître sur les icônes du Christ les lettres alpha et oméga, allusion aux paroles de l'Apocalypse : "Je suis l'alpha et l'oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin" (22, 13), afin de mieux souligner la divinité du Christ, niée par l'hérésie arienne.
Marie, Mère de Dieu
La Mère de Dieu en trône avec l'Enfant Jésus (icône du VIème siècle du Monastère sainte Catherine au Mont Sinaï)
En 431 le concile d'Ephèse condamna Nestorius qui niait l'union hypostatique, c'est-à-dire, l'union de la nature humaine et de la divinité dans la deuxième personne de la sainte Trinité, le Fils de Dieu. Par là Nestorius refusait le titre de Mère de Dieu pour la Vierge Marie. Le concile proclama la maternité divine de la Vierge, Lui attribuant solennellement le nom de Mère de Dieu (Theotokos). Dès lors se multiplièrent les représentations solennelles où la sainte Vierge Marie trônait avec l'Enfant divin sur ses genoux, des anges à ses côtés.
Rappelons qu'il ne reste pratiquement pas d'icônes sacrées de cette époque en raison de la persécution iconoclaste du VIIIème et XIXème siècles qui a détruit un très grand nombre d'images des siècles antérieures. Il a pratiquement été impossible de trouver des images pour illustrer cet article.
Constantinople qui est un pont entre l'Orient et l'Occident, fut l'initiateur d'un style d'art sacré appelé l'art byzantin. Cela fera l'objet d'un prochain article.
Constantinople