Dans un article précédent nous avons rappelé les différentes demandes de Jésus et de la Vierge Marie pour la consécration au Coeur Immaculé de Marie. Voyons maintenant comment ces demandes ont été écoutées.
Les deux premières consécrations du monde au Coeur Immaculé de Marie
Le 31 octobre 1942, à la suite de demandes réitérées, le pape Pie XII consacra seul l'Eglise et le monde au Coeur Immaculé de Marie mentionnant la Russie par une allusion : "Aux peuples séparés par l'erreur et par la discorde, et spécialement à ceux qui professant pour vous une singulière dévotion et chez lesquels il n'y avait pas de maison qui n'honorât votre vénérable icône, aujourd'hui peut-être cachée et réservée pour des jours meilleurs..." . Il renouvela la consécration de façon solennelle, mais toujours seul, le 8 décembre suivant. Le 22 octobre 1940, Notre-Seigneur avait promis à soeur Lucie, moyennant cette consécration, d'abréger la guerre. Dès le lendemain du 31 octobre 42, les armées allemandes subissaient leurs deux premières défaites déterminantes en Afrique et en URSS à Stalingrad. Les trois mois qui suivirent la consécration de Pie XII marquèrent le véritable tournant de la guerre. Soeur Lucie le confirma rapidement.
Consécration en union avec tous les évêques du monde.
Ces deux premières consécrations eurent des effets positifs limités car il manquait un élément important, à savoir, l'union avec tous les évêques du monde. Pourquoi Notre-Seigneur et la sainte Vierge insistent tant sur ce point ? Parce que cette consécration est un appel à l'unité de tous les chrétiens, corps mystique du Christ, dont la tête est le Pape, le vicaire du Christ, à qui le Seigneur a confié les clés du Royaume des Cieux. Et de cette union dépend la foi dans le monde, et la charité qui est le lien qui doit tous unir dans le Christ.
Une troisième consécration au Coeur Immaculé de Marie
Le 15 décembre 1951 soeur Lucie écrivait que "la demande de Notre-Dame concernant la Russie n'est pas encore réalisée". L'année suivante, en mai 1952, la sainte Vierge lui apparut et lui dit :"Fais savoir au Saint-Père que j'attends toujours la consécration de la Russie à mon Coeur Immaculé. Sans cette consécration, la Russie ne peut pas être convertie, et le monde ne peut avoir la paix".
Pie XII, mis au courant, adressa aux peuples de Russie la lettre apostolique Sacro Vergente Anno, datée du 7 Juillet 1952 dans laquelle il consacrait explicitement la Russie. Voici ce texte : "Pour que nos prières ferventes et les vôtres soient sûrement exaucées et pour donner un témoignage spécial à notre particulier bienveillance, de même que nous avons consacré, il y a quelques années, le genre humain tout entier au Coeur Immaculé de Marie, de même aujourd'hui, nous consacrons et nous vouons d'une manière très spéciale, tous les peuples de la Russie à ce Coeur Immaculé."
C'était un grand progrès mais il manquait encore d'autres conditions :
- les évêques du monde entier ne furent pas associés,
- aucun acte de réparation ne fut accompli,
- la communion réparatrice des premiers samedi ne fut pas reconnue,
La première est bien connue mais d'où viennent les deux dernières, sont-elles vraiment nécessaires ? Fait symptomatique, Fatima n'est jamais mentionné.
Dans notre article consacré à l'esprit de réparation à Fatima nous citions une lettre de Lucie datée du 29 mai 1930 dans laquelle elle énumère justement ces conditions pour la conversion de la Russie. Voici le passage capital :
"Si je ne me trompe, le bon Dieu promet de mettre fin à la persécution en Russie, si le Saint-Père daigne faire, et ordonne aux évêques du monde catholique de faire également, un acte solennel et public de réparation et de consécration de la Russie aux très saints Coeurs de Jésus et de Marie, sa Sainteté promettant, moyennant la fin de la persécution, d'approuver et de recommander la pratique de la dévotion réparatrice, indiquée ci-dessus (les cinq premiers samedis du mois)".
Une certaine désaffection de Pie XII envers Fatima
A partir de cette date et jusqu'à la fin de son pontificat Pie XII ne parla plus officiellement et ouvertement de Fatima, sans doute sous l'influence du Père Dhanis. La dernière allusion à Notre-Dame de Fatima remonte à la fin de l'année 1951.
Bien que ces consécrations étaient insuffisantes, Pie XII ne fit pas d'autres tentatives.
Qui est le Père Dhanis ?
Le Père Dhanis est un jésuite, professeur de théologie à Rome à partir de 1946, qui s'est intéressé aux apparitions de la sainte Vierge à Fatima. De son étude il conclut que les apparitions de 1917 sont probablement authentiques, mais le message diffusé par la suite est une invention de soeur Lucie. Il considère que, dans le message, seuls sont vrais l'appel à la prière et à la pénitence. Pour lui, tout le reste n'est qu'imagination d'enfant. Pour le père Dhanis, soeur Lucie et une affabulatrice, certes pieuse et sincère, mais une affabulatrice. L'évêque de Leiria, diocèse de Fatima, proposa au père Dhanis de rencontrer soeur Lucie et de venir consulter l'ensemble des documents, enquêtes, témoignages. Mais le père Dhanis refusa toujours. Si une chose est bien le produit d'un cerveau humain, c'est bien la thèse du Père Dhanis.
En 1962 le Père Dhanis fut consulteur au Saint-Office et avait la confiance du Pape Paul VI.
Jean XXIII et Fatima
Le bon pape Jean ne s'intéressa pas à Fatima. Au début de son pontificat il prit connaissance du secret, mais après il ne voulut plus entendre parler de Fatima, car il considérait que ce troisième secret ne concernait pas son pontificat et d'autre part il n'aimait pas trop les prophètes de malheur ; dans ces conditions la consécration au Coeur Immaculé n'a pas attiré l'attention du pape et il n'a rien fait dans ce sens.
Paul VI et Fatima
Au début de son pontificat, Paul VI prit connaissance du message de Fatima et connaissait par conséquent les demandes de la Vierge. Le concile Vatican II était une opportunité excellente pour faire la consécration demandée. Un nombre non négligeable d'évêques demandèrent cette consécration. Le 21 novembre 1964, le jour de la clôture de la troisième session, il fit une prière à cette intention mais se contenta de remettre le genre humain au Coeur Immaculé de Marie : "A ton Coeur Immaculé, ô Marie, nous remettons finalement le genre humain tout entier" (cf DC 1964, col 1546)
Pour le cinquantième anniversaire des apparitions Paul VI se rendit en pèlerinage à Fatima à titre privé. Dans toutes ses allocutions il ne fit mention ni des apparitions, ni du miracle, ni du message, ni du secret, ni de la dévotion au Coeur Immaculé de Marie, alors que le jour même il signait l'exhortation apostolique Signum Magnum dans laquelle il recommandait la consécration personnelle au Coeur Immaculé de Marie mais sans rappeler le lien avec Fatima... on sent l'influence du père Dhanis.
Voilà ce que le pape Paul VI fit en faveur de Fatima. Il ne reste plus qu'à parler de Jean-Paul II à l'occasion d'un prochain article.