Le retable ouvert un avant goût du Ciel
Avec le retable ouvert dont la surface est double, nous passons de la terre au ciel. Fermé, le polyptyque est dominé par la couleur terre, mais ouvert c'est un chatoiement de couleurs où domine le rouge, le vert et l'or.
La Croix et la Passion toujours présentes
On semble passer de l'Annonciation au Ciel en oubliant le Golgotha, la croix. Mais elle est bien présente, d'abord sur le front de l'ange de l'Annonciation, ensuite elle se trouve prêt de l'autel portée par deux anges et la couleur rouge du roi tout-puissant ne rappelle-t-elle pas la couleur du sang ?
Trône et immolation
Quand on ouvre le retable, apparait en premier le vêtement rouge du Tout Puissant. Le mystère de la croix se montre dès l'ouverture du retable. Cette ouverture est une autre révélation et dévoile l'Agneau immolé dont parle l'Apocalypse, livre de la révélation.
Le retable se trouve donc dominé par deux cènes ayant chacune leur grandeur : le trône de la Majesté divine et l'Agneau immolé.
Création et recréation
La partie supérieure récapitule tout la création et recréation car on y trouve :
- Dieu l'absolument Premier,
- à sa droite, Marie, la première des créatures dans l'ordre de la loi nouvelle,
- à sa gauche, saint Jean-Baptiste le premier de la loi Ancienne car il est le premier des enfants nés de la femme,
- de part et d'autre, aux extrémités nos premiers parents.
La création rassemblée
Dans la partie inférieure, c'est toute l'universalité des hommes et des anges réunis autour de l'Agneau immolé debout sur l'autel. Toute la création est vraiment présente puisqu'on y trouve des fleurs, des arbres, et le règne animal qui est représenté par les oiseaux et les chevaux. Ainsi, au nom de toute la création les hommes adorent l'Agneau mystique.
Cette scène inférieure reçoit sa lumière d'un soleil centré en haut, qui lui-même reçoit toute sa lumière et ses couleurs du panneau supérieur.
Le Christ ou Dieu le Père ?
Sur l'identité du personnage central, en habit rouge revêtu d'une tiare, les spécialistes en discutent toujours. Les inscriptions peuvent nous donner quelques lumières.
La toute puissance du Père
Commençons par les inscriptions latines qui sont autour de la tiare dont voici la traduction :
"Celui-ci est le Dieu tout Puissant à cause de sa divine majesté + le summum optimum de toutes choses à cause de la bonté de sa douceur + Rémunérateur très généreux à cause de son incommensurable libéralité."
Ces paroles conviennent au Père, car la toute puissance le désigne habituellement.
Le Fils mort et ressuscité à jamais
Voyons maintenant les deux lignes qui se trouvent au pied du personnage et cachées en partie par la couronne posée sur le sol.
Ces deux lignes signifient :
"Vie sans mort sur sa tête, Jeunesse sans âge sur son front, joie sans amertume à sa droite, sécurité sans crainte à sa gauche."
Il est difficile de voir qui est désigné par ces paroles ; elles sembleraient mieux convenir au Fils car il a dû affronter la mort sur la croix, l'amertume de sa Passion et la crainte au Jardin des Oliviers ; mais maintenant tout cela n'est plus à craindre et le Fils de Dieu règne éternellement.
Le Dieu des Armées et l'Alpha et l'Omega
Cependant sur le manteau rouge, sur une bande dorée on lit le mot SABAOT qui signifie Dieu des Armées : cela convient au Père. Mais d'une part ce mot se situe sur le côté droit à l'endroit de la plaie de côté du Christ Sauveur, d'autre part le O est un omega grec et il est précédé d'un A : nous pensons tout de suite à l'Alpha et l'Omega de l'Apocalypse pour désigner le Fils. De plus la bordure sur la robe en bas on peut lire "Roi des rois et Seigneur des seigneurs", titre que l'Apocalypse attribue au Christ (Ap. 17, 14). En fin sur l'arrière plan est représenté un motif repris plusieurs fois : une vigne, un pélican (symboles du Christ) et les mots IHESUS XRS. Toutes ces inscriptions convergentes nous incitent à voir en ce personnage royal le Christ comme première conclusion.
La sainte Trinité à la verticale
Mais que voit-on dans l'axe vertical ? L'Agneau immolé, la colombe dans le soleil et le souverain vêtu de rouge : n'est-ce pas une image de la sainte Trinité. Par conséquent on est en droit de conclure que ce roi majestueux est Dieu le Père, car la colombe ne peut être que l'Esprit-saint et l'agneau immolé le Fils de Dieu incarné. Alors ce personnage mystérieux est-il Dieu le Père ou Dieu le Fils ?
La Trinité dans le personnage royal ?
N'y aurait-il pas une autre solution, qui serait de considérer dans le souverain en rouge un symbole de la Trinité, le saint Esprit étant représenté par le manteau rouge signe de la Charité et le roi représenterait à la fois le Père et le Fils ?
Selon cette interprétation la sainte Trinité serait donc représenté deux fois, une selon l'axe vertical et une deuxième dans le personnage royal lui-même. Mais, dans ce dernier cas, comment distinguer le Père et le Fils ? Dans l'évangile de saint Jean, Jésus dit à Philippe, le soir de la Cène : "Qui m'a vu a vu le Père. Le Fils de Dieu est donc l'image parfaite du Père. Par conséquent pour un même personnage on peut à la fois représenter le Père et le Fils avec des attributs qui convient à l'un ou l'autre comme on l'a rappelé ci-dessus.
Le Christ, roi de l'univers
La couronne au pied du roi rappelle que sa royauté n'est pas de ce monde et que toutes les nations doivent reconnaître la domination universel du Christ-Roi. Cette royauté universelle est manifestée par la triple couronne sur la tête du souverain empourpré : la tiare symbolise la domination absolue de Dieu sur toute créature.
Une décoration éblouissante
Pou terminer admirons la richesse et la finesse de la décoration : ces broderies au bord du vêtement ; toutes ces petites perles rondes, la richesse de la couronne, de la tiare ; comment est orné le sceptre.
Arrêtons aussi sur ces nombreuses pierres précieuses qui ornent les habits des trois personnages du tableau supérieur. Par l'éclat de leur couleur ils viennent en renfort à la gloire rendue par les créatures inanimées au Dieu trois fois saint.