Portrait de Pauline Jaricot (Wikipedia)
Le Rosaire vivant est une association due à la vénérable Pauline Jaricot (1799 - 1862) qui sera bientôt béatifiée.
L'appel angoissé du pape Léon XII
A l'occasion du grand jubilé de l'année 1825, le Souverain Pontife Léon XII adressa aux fidèles une Encyclique, véritable cri d'alarme signalant les dangers qui menaçaient l'Eglise et le France en particulier. En effet, livrée tout entière au plaisir, la société française se précipitait, sans s'en douter, vers les abîmes. Les sociétés secrètes avaient repris leur travail de sape de la société et de l'Eglise.
Un peu contre toute attente, ce jubilé provoqua un retour général vers Dieu, particulièrement en France. Les prédications faites partout réveillaient dans les coeurs, jusqu'alors indifférents ou prévenus, l'amour de nos aïeux pour le Dieu de saint Louis.
Le zèle et la clairvoyance de Pauline Jaricot
La vénérable se réjouissait grandement de ce saint spectacle, tout un peuple prosterné aux pieds des autels :
"Malgré tout, écrit-elle, j'étais bien loin d'être rassurée sur l'avenir, car une lumière intérieure me faisait entrevoir l'effet de l'inconstance humaine sur ces masses qui, sincères dans leur repentir, demeuraient au fond légères et dévorées par la soif du bien-être et du plaisir."
D'un autre côté, elle savait que les sociétés secrètes avaient juré de travailler plus sourdement et avec plus de persistance que jamais, à saper les bases de la religion, avec celles des moeurs chrétiennes.
Face à ces dangers elle cherchait à organiser partout une sorte de ligue contre les coups de la justice de Dieu, par la quarantaine de pénitence, qu'elle avait déjà établie chez son beau-frère. Par écrit et de vive voix, elle presse et conjure tous ceux qu'elle rencontre à désarmer la colère du Seigneur, outragé par les crimes d'une nation catholique, et leur propose comme moyen, la Quarantaine de pénitence, qui consiste à réunir quarante personnes, jeûnant, chacune un jour, et joignant à ce jeûne une aumône et une visite au Saint-Sacrement.
Quand l'Esprit-Saint entre en action
A cette époque Notre Seigneur lui donna une connaissance extraordinaire des menées de l'impiété, et que dès lors elle s'offrit en victime pour obtenir le salut de l'Eglise et de la France. A partir de ce moment, Pauline ne cessa de sentir la double étreinte des souffrances de l'âme et de celles du corps. Entre cette âme et la Justice divine se livraient d'admirables combats. Ces écrits révèlent qu'en ces années elle souffrit de grande épreuves intérieures. Citons se magnifique passage très éclairant pour l'origine et l'esprit de cette dévotion du rosaire vivant :
« Bientôt, écrit-elle, les maux de ma patrie augmentant à vue d’œil, il ne me fut plus possible de mettre en doute la vérité de la lumière intérieure qui me les avait montrés si longtemps d’avance.
Dévorée de regrets, dans la crainte que Dieu n’eût rejeté mon offrande, toujours désolée des malheurs et des crimes de la coupable France. je me reprochais ces malheurs et ces crimes, me croyant responsable du sang de mes frères, pour n'avoir pas empêché leur châtiment par de continuelles supplications. Je sentais le feu de la
justice mêlée d’amour pénétrer plus que jamais toute la substance de mon cœur. Comme je n’osais pas croire à la possibilité de réparer le temps perdu, je désirais qu'il me fût au moins permis de faire passer dans les âmes plus fidèles et plus pures que la mienne, le sentiment vif et profond que Dieu me donnait de la grandeur de son indignation contre son peuple, et de la puissance de la prière pour le désarmer.
Au moment où je m’y attendais le moins, la bonté divine me fournit le moyen de parvenir à mon but.
J'avais entendu parler des admirables effets du saint Rosaire, et j’espérais que s'il m’était possible d'en raviver la dévotion, cette céleste prière calmerait le courroux divin et produirait dans les âmes des fruits de salut. Mais l'occasion me manquait. La Providence daigna me la fournir, en inspirant à l'un des plus fidèles serviteurs de Marie (M. l’abbé Wurtz), de former une petite société destinée à répandre des objets de dévotion.
Ce fut alors que Notre-Seigneur m’envoya l’idée de profiter de cette circonstance pour organiser le Rosaire vivant.
Jusque-là, je m’étais demandé comment il serait possible de présenter à la légèreté française, à son peu d'attrait pour la méditation et la prière, une pratique regardée depuis longtemps comme surannée, et qu'on abandonnait aux ignorants dont si peu de personnes prétendent faire partie? Comment surtout espérer que les malades spirituels, auxquels l’excès de la faiblesse a ôté le sentiment du mal et même le désir de la guérison, accepteraient un remède dont la dose effraie quiconque n'en connaît pas la douceur ?
Tel était mon embarras, quand j’envisageai le moyen à prendre pour rajeunir la dévotion du Rosaire, tel qu’il avait été enseigné à saint Dominique.
La nécessité de diviser et de subdiviser le nombre des personnes, réunies en association pour répandre les objets de piété, me donna la pensée de faire proposer par elles la pratique journalière du Rosaire, lequel, divisé entre quinze associés, devait ne laisser à chacun qu’une seule dizaine à réciter par jour.
La condescendance de votre cœur, aimable Jésus, me suggéra, sans doute, ce moyen, qui par la simplicité de sa forme, venait au secours de la faiblesse de vos enfants. Car bientôt, sous la dénomination de Rosaire-vivant, l'antique prière de saint Dominique, parut une nouvelle et gracieuse dévotion, si bien que ce salutaire remède, ainsi présenté, fut reçu avec joie et empressement.
Dès lors, commença pour la France et pour le monde entier, une nouvelle série de grâces, malgré tous les efforts que fit le démon pour étouffer, dès le premier jour, le Rosaire vivant. Il se servit surtout de personnes estimables, et même pieuses, pour contrarier et paralyser mes faibles efforts. »
Dépliant des 20 mystères du Rosaire
Ce texte de Pauline Jaricot nous éclaire bien sur l'origine de l'association du Rosaire vivant, dévotion qui existe encore. Nous pouvons aussi, sans s'affilier à quelque association, réciter chaque jour une ou plusieurs dizaines du chapelet pour la conversion du monde. Par là nous rejoignons la demande de la sainte Vierge à Fatima de prier pour les pauvres pécheurs.
Dans un prochain article nous raconterons comment le rosaire vivant s'est développé.